Machine Végétale

(Site du Mont Hubert, Sangatte, France)

Diptyque photographique argentique sur dibond : 305 x 120 cm

In situ, sculpture éphémère, bois de sureau et pieux métalliques : 730 x 340 x 350 cm

Nous sommes face à l’Angleterre, là où le passage est le plus étroit. Au large, dans les deux sens, des dizaines et des dizaines de navires, comme il en passe tous les jours à cet endroit. La lumière est difficile, toujours changeante. Suivant les conditions météorologiques, il est possible d’entrevoir parfois, là-bas, la ligne des hautes falaises blanches de Douvres. Car Douvres pour la France c’est la perfide Albion, l’ennemi héréditaire avec lequel on a si souvent croisé le fer. Mais c’est aussi cet  Autre  qui nous ressemble tant.

Un point à l’horizon qui dès 1909, alors que nous ne sommes encore que dans les premiers temps d’une aviation balbutiante, fascine nos deux fous volants que sont Hubert LATHAM et Louis BLÉRIOT. Le premier échouera plusieurs fois, là, tout près, au bord de l’abîme ; le second, lui, réussira sur sa chère Antoinette cette première traversée de la Manche qui fera de lui à tout jamais un héros. Car c’est de cette histoire dont il est ici question. Réaliser enfin sur une machine volante le saut de puce techniquement parfait qui permettra d’atteindre ce lointain pourtant si proche. Mais comment y parvenir ? Il y a bien ce vaisseau ailé que l’on nomme déjà avion mais qui tient encore trop largement de son modèle, l’oiseau. Un bien frêle esquif qui ressemble étrangement à cette sculpture faite de branches de sureau, dont la souplesse et l’adaptabilité au lieu sont les plus grandes vertus. Coupées sur place, assemblées sur le modèle des grands oiseaux marins cette forme, elle, sait s’accommoder du vent colérique. Elle vous emmènera là-bas sans encombre, sains et saufs, sur cette rive rêvée soudain devenue amie.

(En 1993 la sculpture fut symboliquement édifiée tout près de l’entrée du tunnel sous la Manche, à l’époque, encore en construction)