ROUGE MEMOIRE

Dans le parc de la Bégraisière à Saint-Herblain, à l'occasion du festival Jours de fête, le plasticien François MÉCHAIN propose une installation participative: pendant plusieurs mois, des gens des alentours, intéressés par le projet, ont cherché, collecté et trié des vêtements de toutes sortes : vêtements usagés, plus ou moins marqués par le temps, habits pour enfants, pour adultes, récents ou démodés… Le dénominateur commun de cette quête était qu’ils soient tous de couleur rouge.  Les gens sont ainsi impliqués dans la préparation du projet (collecte), puis dans sa mise en œuvre (accrochage) et dans sa phase de démontage : de cette œuvre éphémère..

Dans le parc l’artiste a choisi quatre arbres, quatre gros châtaigniers plantés en ligne. Les vêtements sont suspendus aux branches, recouvrent les troncs, habillent les formes végétales et semblent couler vers le sol tel un flot qu'on ne saurait endiguer, qui envahirait tout.

Les vêtements sont présents comme autant de dépouilles mais les corps en sont absents. Ils nous parlent ainsi des êtres. Ce binôme présence / absence, matériel / immatériel nous renvoie aussi sans doute à l’actualité la plus brûlante, celle des flux migratoires ; dans les jungles qui les jalonnent, les vêtements abandonnés ou en train de sécher sont là comme autant de signes qui disent le passage des êtres et leurs vies. Ce sont encore ces mêmes oripeaux qui jonchent le sol sur les côtes après la traversée périlleuse, qui signalent le passage furtif d’humains en fuite. Quitter ses vieux habits….

L’arbre, support de l’œuvre, a ici son importance : on peut aussi songer à la vieille coutume plus ou moins païenne des arbres à voeux sur lesquels les gens avaient pour habitude de clouer les objets les plus divers (vêtements, objets du quotidien) pour matérialiser leur requête, souvent une demande de guérison. Ne parle-t-on pas également des vieux arbres comme des sujets dans le langage forestier ?
Nos histoires les plus universelles se disent souvent à travers des objets du quotidien les plus intimes, banals et sans valeur a priori. En les mettant ici à l’oeuvre à travers les vêtements, l’artiste les révèle et leur donne une forme qui puisse parler à chacun sur le mode visuel.

Le rouge comme le prix de nos vies, de notre sang.

Montrer pour dire…..


Nicole VITRÉ, mars 2016

* Pour clore le processus les services de la Croix Rouge enverront l'ensemble des vêtements à des migrants.

Installation participative initiée par François MÉCHAIN avec la collaboration de l'atelier Volume de la Maison des Arts (Gwenola, Loïc, Isabelle, Pierre, Jean-Claude, Solen et Pierre).