Arkadia

(Bytina, Arcadie, Grèce, 1991)

- In situ, sculpture éphémère, amandier, chêne vert et pierres calcaires : 1800 x 700 x 650 cm

Bytina, Grèce. Un petit village comme il en est tant en Arcadie. Des collines partout autour couvertes de cette végétation typique des régions méditerranéennes que l’on pourrait résumer à une multitude de petites boules crispées et disséminées sur d’anciennes terrasses en ruines.

Des formes dont la sculpture se fera l’écho en les magnifiant. L’amandier, le chêne vert et les pierres calcaires des terrasses démantelées, trois éléments choisis comme figures emblématiques de la Grèce. On est loin des cartes postales aux couleurs convenues vendues aux touristes de passage. Arrangements ramassés, compacts d’éléments d’ordinaire dispersés, ces matériaux, en une sorte de condensation métonymique, chantent le genius loci.

La sculpture s’organise en fonction d’un unique point de vue et l’œuvre n’a d’existence que par la trace photographique. Qui oserait en effet s’aventurer en ces lieux ? J’ai eu recours au redressement anamorphotique pour l’obtention, à partir d’une forme ovale très allongée (1500 x 350 cm) d’un cercle de pierres presque parfait, projection fictive sur le sol de la sphère de chêne vert qui lui est contiguë. Sculpteur devenu photographe pour les besoins la cause, je le redeviens dans ma chambre noire pour la phase de l’agrandissement. Le négatif n’est en effet qu’une « promesse » qui ne demande qu’à être « orientée ». La réalité n’existe pas.

Ainsi sur l’image le ciel nuageux fait écho aux parties blanches de la roche sur la garrigue sombre ; la portion de ciel dans la partie supérieure forme un équivalent plastique de la zone de sol, plus bas. En nommant cette œuvre Arkadia je  révèle aussi les  origines géographiques  de  mon lieu d’action mais  rend aussi hommage à l’Arcadie des grands peintres que j’admire tant. Et plus particulièrement à l’œuvre de Claude LE LORRAIN qui avait, dit-on, parfois pour habitude de travailler en même temps sur deux toiles, deux toiles dans lesquelles l’espace vide du ciel de l’une découpait une surface équivalente à celle des masses végétales de l’autre. Renvois, retournements, renversements continuels, l’œuvre s’évertue à fixer temporairement un sens qui échappe et se reconstruit sans fin.