KAISSARIANI

(Sur les hauteurs d’Athènes, Grèce, 1993)

Photographie noir & blanc sur dibond : 160 x 120 cm

In situ, sculpture éphémère, amandier, chêne vert et pierres calcaires : 1800 x 700 x 660 cm

Kaissariani se trouve sur le Mont Hymette, au-dessus d’Athènes. L’endroit a été considéré pendant l’Antiquité comme le domaine des abeilles. Une grande cuvette tombant en pente douce sur les premiers faubourgs de la capitale. Parmi les éléments naturels présents sur le terrain schisteux, des cyprès innombrables, de véritables colonnes vivantes, ponctuent l’espace jusqu’au Parthénon visible sur l’horizon. Les herbes aromatiques invitent à concevoir quelque sculpture d’odeurs. C’est avec ces plantes de la garrigue montées sur une armature de grillage – tout en notant au passage certaines analogies de structure entre les végétaux et leur support – que je construis une puissante colonne de près de dix mètres de long. Colonne antique couchée au sol après quelque séisme comme celles de l’Acropole là-bas au fond, trait d’union  entre  ce  qui constitue l’essence de la Grèce aujourd’hui ? Je veux  parler de cette fierté du siècle de Périclès que tout Grec porte en lui, ce respect de la religion – le célèbre monastère de Kaissariani est là, à deux pas, derrière la sculpture -  et cette attirance en même temps pour l’Athènes contemporaine, celle des voitures et des fast-foods, copie conforme en perte d’identité des mégalopoles du monde entier ?

D’aucuns y verront certainement là un nouvel hommage à la tradition picturale. Paysage avec présence de ruine agreste pour respecter les règles du beau pittoresque ou vue avec sfumato comme chez Leonardo Da VINCI ? C’est à chacun d’en décider. Une chose est certaine. Athènes, comme la plupart de nos grandes villes aujourd’hui, étant ravagée par la pollution, je n’ai pas hésité à enfreindre la fidélité au réel, tant je sais qu’elle se construit dans la vision du photographe. J’ai retouché - vieille pratique des photographes portraitistes du XIXème - avec beaucoup d’irrespect l’image au ferricyanure pour mieux souligner les lignes d’ un Parthénon dont je voulais conserver l’éclat.